Le nouveau canal Istanbul : révolution du trafic maritime ou désastre écologique ?

Le chantier du canal Istanbul, qui reliera la mer Noire à la mer de Marmara vient de débuter avec la pose des fondations du premier pont. Le canal devrait faire 45 kilomètres de long, 275 mètres de large et 21 mètres de profondeur.

Le premier objectif est de désengorger le détroit de Bosphore, qui est trop fréquenté et trop étroit. Les navires sont en effet contraints d’opérer de nombreuses manœuvres pour traverser le passage, ce qui rend le trafic plus dangereux. Entre 2001 et 2011, on dénombre pas moins de 700 incidents.

Le président turc, Erdogan, a estimé que le canal Istanbul pourrait réduire le trafic du détroit de Bosphore de 90%, et qu’il serait 30 fois plus sûr. Le canal permettrait le passage d’environ 55 000 navires par an, alors que le Bosphore n’en permet que 41 000. En comparaison, le canal de Suez voit passer en moyenne 19 000 navires chaque année.

Le président y voit aussi une sorte de fierté pour le peuple turc, même si le projet se heurte à de fortes réticences.

Les résistances concernent l’environnement tout d’abord. Le tracé du canal passe par des terrains agricoles, des lacs et des forêts, ce qui provoque l’inquiétude de nombreux scientifiques. Des spécialistes estiment également que l’équilibre des courants et contre-courants entre la mer de Marmara et la mer Noire pourrait être perturbé, et que cela pourrait aspirer les eaux polluées de la mer Noire vers la mer Méditerranée.

Le maire d’Istanbul, Ekrem Imamoglu, a d’ailleurs fait entendre son mécontentement vis-à-vis de ce projet, en le qualifiant de « gaspillage financier » et de « catastrophe écologique ».

Erdogan fait pourtant la sourde oreille et a déclaré que le nouveau canal était au contraire je cite « le projet le plus éco-responsable du monde », et s’est justifié en invoquant les 204 experts qui se seraient penchés sur le sujet.

Le chantier est estimé à 15 milliards de dollars, un coût jugé exorbitant par le maire d’Istanbul. Le canal s’inscrit en fait dans la politique un peu folle de grands travaux d’Erdogan, dont le financement interroge.

Le projet est né d’une promesse en 2011 lors des législatives. Le canal devait à l’origine être inauguré en 2023, mais les autorités prévoient désormais la fin des travaux d’ici 6 ans.